« L’entraîneur : Un rôle exemplaire ! »

Publié le 30/04/2019

Michael ILLOUZ, 40 ans, enseignant d’EPS au lycée Professionnel Cognacq-Jay à Argenteuil depuis 10 ans, occupe Ã©galement le rôle de coordonnateur UNSS du district d’Argenteuil Lycée et Coordonnateur Technique Futsal.

 

Quel est votre rapport au football ?

J’ai toujours été passionné de football et j’ai longuement pratiqué cette activité à un modeste niveau.

J’éprouve maintenant beaucoup de plaisir à encadrer mes élèves à l’Association sportive de l’établissement dans cette activité, ainsi qu’en futsal, qui sont 2 pratiques complémentaires.

 

Exercez-vous des fonctions dans un club ?

Non, je n’exerce plus de fonction dans un club. Il y a 12 ans, quand j’étais encore joueur, j’avais obtenu mon diplôme d’initiateur 1 de football et j’ai entraîné pendant une année une équipe de jeunes de moins de 15 ans avec qui j’avais connu 2 montées.

Avec l’âge, l’envie de reprendre du service se fait sentir.

Et, j’envisage de suivre une formation en préparation mentale pour sportifs.

 

Quels sont tes rapports en général avec les arbitres ?

Mes rapports avec les arbitres ont toujours été bons, je n’ai d’ailleurs jamais eu de carton rouge dans ma modeste carrière de joueur amateur.

Je n’ai jamais protesté auprès d’un arbitre car j’ai compris depuis le plus jeune âge qu’occuper cette fonction était souvent ingrat et de plus, un exercice difficile.

L’arbitre est toujours très exposé, plus au football que dans les autres activités selon moi.

J’aimerai voir l’attitude des joueurs de rugby sur les terrains de football.

Les règles au rugby font que les arbitres sont plus respectés : le joueur de rugby qui proteste auprès de l’arbitre est sanctionné immédiatement et doit reculer de 10 mètres supplémentaires.

Je pense que c’est un problème d’éducation à la base.

Je n’ai jamais compris que des joueurs puissent se transformer en rentrant sur un terrain, ou qu’ils puissent littéralement péter les plombs et agresser verbalement ou physiquement des arbitres suite à leurs décisions.

Personnellement, je trouve que les entraîneurs et les éducateurs doivent avoir un rôle exemplaire vis à vis des arbitres. Il faut avant tout former les éducateurs qui formeront à leur tour les joueurs sur ces questions.

Ils doivent selon moi apprendre à anticiper et sortir leur joueur quand ils sentent que celui-ci perd son sang froid.

Ils doivent aussi véhiculer auprès de leurs joueurs un message de tolérance vis à vis de l’arbitrage et des erreurs que les arbitres peuvent commettre.

Avant chaque début de compétition en UNSS, je rappelle aux joueurs que l’erreur est humaine et que l’arbitre peut aussi faire des erreurs, comme un joueur pourrait rater un but tout fait ou sa relance.

C’est très facile de critiquer sur son canapé ou dans les tribunes, moins facile d’avoir le courage de prendre un sifflet.

Je me demande parfois qu’est-ce qui motive aujourd’hui un homme ou une femme à devenir arbitre ?

Il faut avoir les épaules larges et mieux vaut parfois être sourd pour ne pas entendre les pseudos supporters crier des « Arbitre en… Â»

Je suis d’ailleurs outré quand je vois dans les tribunes des spectateurs se mettant dans des états incroyables en invectivant par des noms d’oiseaux les arbitres.

Quel arbitre, aujourd’hui, a envie d’arbitrer un match devant ses enfants ou son conjoint dans les tribunes ? (N’est ce pas traumatisant pour un enfant de voir un tel déferlement de haine sur son père arbitrant un match ?)

Alors qu’un joueur pourrait le faire fièrement devant les siens ?

Il faut travailler sur ce point pour que les gens aient une vraie prise de conscience et mesurent leurs responsabilités.

 

Comment as-tu connu la classe arbitrage ?

J’ai connu la classe arbitrage par Alain Lemoine, coordonnateur UNSS du District Argenteuil Collège, très investi pour le développement du sport scolaire et également dans le monde fédéral. C’est lui qui  nous a présenté la classe arbitrage et nous a sollicité pour faire officier régulièrement ces jeunes lors les rencontres UNSS.

Nous avons alors échangé avec toi toutes les semaines et dispatcher les élèves sur les différentes compétitions.

Je trouve que ce partenariat UNSS/District de Football Arbitrage est une excellente chose et j’espère que ce dispositif va se pérenniser.

C’est une véritable aubaine pour nous et une formidable initiative portée à la fois par la section arbitrage du District de football du Val-d’Oise, et le lycée Gustave Monod d’Enghien-les-Bains.

Cette 1ère année a été une véritable réussite puisque les 7 arbitres de la section ont arbitré des rencontres quasiment tous les mercredis depuis le mois d’octobre.

C’est une opération gagnant/gagnant puisque chacun y a trouvé son compte :

les arbitres ont pu se forger une expérience supplémentaire lors des ces rencontres du mercredi et nous avons pu profité d’arbitres très bien formés.

Cerise sur le gâteau, nous sommes arrivés à aller au bout de notre projet commun, puisque 3 arbitres de la section arbitrage qui nous ont suivis depuis le mois d’Octobre se voient récompensés en accompagnant le LP Cognacq-Jay d’’Argenteuil aux Championnats de France des Lycées Professionnels à Nice, le Lycée Jean-Jaurès d’Argenteuil aux Championnats de France Juniors à Auch et le Collège Marcel Pagnol de St Ouen l’Aumône aux Championnats de France Cadets à Bourges.

Mamadou DIAMBO et Lionel COSTA ont d’ailleurs été désignés meilleur arbitre de la compétition et validés Jeune Officiel de niveau national. Bravo à eux pour cette belle victoire !!!

Les élèves de la classe arbitrage ont pris leur rôle très à cœur et ont progressé au fil des rencontres.

Plusieurs d’entre eux officiaient déjà au niveau fédéral en football mais ont découvert en UNSS l’arbitrage du futsal. Ce qui n’est pas un exercice facile car les règles diffèrent beaucoup entre ces 2 activités, ce qui expliquent que parfois les joueurs ont du mal à comprendre certaines décisions en futsal où les contacts sont interdits.

En outre, les élèves de la section arbitrage ont dû et su s’adapter aux particularités des règles UNSS, qui diffèrent de celles du monde fédéral.

 

Qu’est ce qui change avec la classe arbitrage ?

Ce qui nous a facilité la tâche avec la classe arbitrage, c’est que les élèves de cette classe sont volontaires et motivés pour occuper cette fonction et prennent donc plus à cœur leur rôle.

Ils sont très à l’écoute des consignes, plus attentifs et concentrés et adoptent une attitude et une posture d’arbitre, maîtrisent le règlement et la gestuelle, coordonnent leurs déplacements et communiquent avec leur partenaire d’arbitrage.

Clairement, pour nous professeurs d’EPS et encadrants, c’est un luxe et ça nous prend un peu moins d’énergie et nous dégage un peu plus de temps pour gérer nos équipes.

Alors que d’habitude, nous sommes souvent obligés de désigner des joueurs pour occuper le rôle d’arbitre faute de candidats.

Ce n’est pas toujours évident de jouer et d’arbitrer au cours de la même compétition.

De ce fait, nous n’avons aucun connu aucun problème d’intégrité au niveau des décisions arbitrales.

De plus, les jeunes de la section arbitrage étaient très bien encadrés puisqu’à chaque journée de compétition, un adulte de la section arbitrage était présent pour les superviser.

J’en profite pour les remercier chaleureusement de cet accompagnement (Emmanuel, Grégory et Adrien).

 

Quel est le sentiment de tes élèves vis à vis de ces arbitres ?

Je trouve que globalement, les rapports entre les élèves et ceux de la classe arbitrage ont plutôt été cordiaux même si tout n’est jamais parfait.

En tant que professeurs d’EPS, nous avons avant tout un rôle d’éducateur et il est de notre ressort d’essayer d’éduquer les jeunes pratiquants et d’essayer de changer certaines mentalités vis à vis de l’arbitrage et des règles en général.

Le fait que les élèves de la classe arbitrage soient vêtus avec des tenues officielles fait que certains élèves peuvent être moins tolérants sur d’éventuelles erreurs, car ils n’ont pas toujours à l’esprit que ces élèves sont volontaires et en formation.

La tolérance vis à vis de l’erreur humaine est quelque chose qui s’apprend et qui doit être appris dès le plus jeune âge.

Arbitrer est un exercice difficile qui nécessite de nombreuses compétences et qualités.

Le problème dans le football, c’est la surmédiatisation, et notamment des comportements qui ne sont pas dignes de sportifs de haut-niveau : qu’ils soient joueurs, entraîneurs, ou dirigeants.

Malheureusement, cela complique notre tâche d’éducateur.

 

Tu viens de signer une belle 5e place aux championnats de France LP, peux tu nous parler de cette compétition ?

Premièrement, je suis très heureux qu’on soit arrivé à se qualifier pour la 1ère fois aux championnats de France Futsal Lycées Professionnels.

Nous avions eu la chance l’année précédente de goûter à la joie de participer aux championnats de France de foot à 7 à Montpellier.

Les championnats de France LP ont réunis les 12 qualifiés de chaque inter-académie, répartis en 4 poules de 3 équipes.

Nous avons connu quasiment le même parcours que l’an passé puisqu’ après avoir gagné le 1er match, puis nous avons perdu notre 2e match et 3e match (1/4 de finale), avant de gagner les 4e et 5e matches pour signer une honorable 5e place.

Comme l’an passé, les pénalties ratés restent une déception, car au vue du jeu produit, nous avions la place pour viser un podium.

 

Comment selon toi peut-on faire évoluer positivement les rapports joueurs/arbitres ?

En obligeant les joueurs à prendre le sifflet lors d’entraînements, ou de matches pour  qu’ils se rendent compte de la difficulté de la fonction.

« Celui qui n’a jamais arbitré peut critiquer facilement l’arbitrage, celui qui s’est déjà essayé à cette fonction, le fait beaucoup moins Â»

Ce n’est jamais très agréable de se faire invectiver ou de se « faire pourrir Â».

Les présidents de club, les entraîneurs de club, les dirigeants, les joueurs de haut-niveau doivent être exemplaires afin de ne pas voir se reproduire les mêmes faits sur les terrains amateurs, de sport scolaire ou cours de récréation.

Il faut aussi apprendre dès le plus jeune âge à accepter les défaites, sans remettre systématiquement en cause l’arbitrage.

Il ne faut pas oublier que sans arbitre, il n’y a pas de jeu.

Nous devons aussi faire intégrer aux jeunes que « l’enjeu ne prévaut jamais sur le jeu Â», ce qui est la règle fondamentale de l’UNSS.

En France, nous sommes très en retard sur la préparation mentale des sportifs et je pense que celle-ci doit être intégrée rapidement en compétition lors de la puberté pour apprendre à chacun à maîtriser ses émotions et son engagement et à apprendre à faire l’analyse des défaites sans rechercher systématiquement des causes externes.

Il faut aussi selon moi créer des moments de partage et de convivialité entre les joueurs et les arbitres, les entraîneurs, les dirigeants pour que tout le monde se rende compte que nous sommes avant tout des hommes et des femmes et que nous partageons la « réellement Â» la même passion.

A ce titre, nous avons eu la chance de pouvoir emmener dernièrement 40 jeunes (joueurs des 2 établissements qualifiés aux championnats de France UNSS et élèves de la section arbitrage) au stade de France pour assister entre AMIS au match  France/Colombie grâce au soutien de la FFF qui a nous a invités gracieusement.

J’en profite pour remercier la Fédération Française de Football ainsi que le District de Football du Val-d’Oise pour ses dotations pour les équipes qualifiées.

 

 

Merci Michael

Par Emmanuel Boisdenghien

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